Frédéric Barilaro : "La formation c’est l’identité, l’ADN de l’AS Monaco"
Il est désormais l’entraîneur/formateur le plus titré en Coupe Gambardella derrière l’Auxerrois Daniel Rolland (4). En ayant soulevé pour la troisième fois la « Coupe de France des jeunes » le 29 avril dernier au Stade de France, Frédéric Barilaro a en effet marqué un peu plus l’histoire de la compétition. Une tradition de la formation, au-delà de la gagne, à laquelle il est toujours attaché, comme il nous le confie au moment de faire le bilan de la saison. Entretien. 🎙
Bonjour Frédéric. Pour commencer, quel bilan tirez-vous de cette saison ?
Au niveau du championnat, cela a été compliqué car nous avons eu besoin d’une période d’adaptation, avec le nouveau projet du Groupe Elite qui a été mis en place. C’était compliqué d’avoir une continuité dans les résultats, même si ça nous a permis de faire jouer pas mal de jeunes joueurs, de 17 ans.
Nous avions une équipe très jeune, qui a eu des difficultés en championnat, même si sur la fin nous terminons à la 5e place. C’était une poule très serrée, où tout le monde était proche les uns des autres. C’est finalement une saison de transition où nous étions souvent dans l’adaptation à cette nouveauté.
Et puis il y a cette nouvelle victoire en Coupe Gambardella, avec quasiment que des matchs à l’extérieur…
C’est exactement ça. Une aventure qui a démarré Vénissieux et qui par la suite nous a fait voyager dans toute la France, étant donné que nous nous sommes déplacés à chaque fois. On a joué dans l’Est (à Nancy), en PACA (Aubagne), en Normandie (Rouen), en Bretagne (Nantes), dans le Sud-Ouest (Pau)… donc ça nous a permis de dégager un groupe, qui a grandi au fil des matchs. Et qui a montré de belles choses ! C’est ce que je retiendrai de ce parcours. Car partout où nous sommes allés, nous avons laissé une belle image de l’AS Monaco.
C’est aussi la réussite de toutes les équipes de l’Academy, puisqu’il y avait des membres des trois équipes dans cette génération !
Oui c’est ça, c’est le fruit de la formation. On a pu s’appuyer sur des joueurs qui ont des qualités, qui se sont montrés bluffants et ont montré beaucoup de caractère. Car nous avons donc joué tous nos matchs à l’extérieur, donc ce n’était pas toujours évident. Mais même dans les moments compliqués, ils ont toujours su répondre présent. Avec cette finale au bout au Stade de France où on gagne 4-2. Sur l’ensemble de notre performance, c’était largement mérité.
Parlez-nous un peu de la préparation de cette finale justement. Vous leur avez donné les clés pour pouvoir gérer l’évènement…
Ce que j’ai essayé de leur faire comprendre, c’est qu’il ne fallait pas jouer le match avant dans la tête. Mais cela n’a pas été vrai que pour la finale, car ils ont toujours eu le même état d’esprit, la même approche à chaque rencontre, avec beaucoup d’humilité et de détermination.
Ensuite effectivement je leur ai expliqué comment ça allait se passer, le déroulé de la journée, car j’avais déjà eu la chance de me retrouver deux fois dans cette situation (vainqueur en 2011 et 2016, ndlr). Mais ce que je retiens c’est cette expérience fabuleuse que nous avons vécu tous ensemble, en ayant joué tous nos matchs à l’extérieur encore une fois. Ce qui nous a permis dans un sens d’être dans notre bulle, et de préparer tranquillement ces échéances.
Vos joueurs ont montré du caractère notamment en finale, où l’équipe est menée au score…
Nous sommes menés contre le cours du jeu, car nous avons deux ou trois situations très chaudes pour marquer. On prend effectivement ce but sur coup de pied arrêté, et derrière ça Ethan (Schulz) fait un bel arrêt. Mais ensuite nous avons repris le dessus, et nous aurions même pu tuer le match avant la mi-temps avec le penalty de Mayssam (Benama). Mais ce que je retiens aussi, c’est que nous avons été reçus au Conseil National, après avoir été félicités au Palais.
C’est l’identité, l’image du Club cette formation. Il est important de continuer à transmettre ces valeurs, et c’est avec beaucoup de fierté que nous avons vécu cela. L’idée qu’on veut transmettre, c’est aussi que lorsque qu’on revêt ce maillot rouge et blanc, on représente un club, mais porte aussi les couleurs d’un pays ! Je garde aussi ça en mémoire, car cela a rendu des gens heureux.
C’est important de rappeler que la formation est l’ADN de l’AS Monaco !
Oui c’est ça. Et comme je l’ai dit précédemment, nous avons voyagé dans toute la France, et partout nous avons laissé une belle image de la Principauté.
Cette victoire est votre troisième en Coupe Gambardella en tant que formateur. Existe-t-il un secret ?
Il n’y en a pas. La Coupe, c’est spécial, et à chaque fois que nous l’avons joué, j’ai fait comprendre à mes joueurs que c’est quelque chose qui leur appartenait, et que nous n’étions là que pour les guider, les emmener. Dans ce genre de compétitions, il faut prendre les matchs les uns après les autres, et c’est ce que nous avons toujours fait dans les trois parcours en 2011, 2016 et 2023.
Ensuite je fais ce métier pour les émotions qu’il procure. Et la Coupe, c’est vraiment très spécial, ça procure beaucoup d’émotions. On passe par des moments compliqués et on arrive à les surpasser, pour avoir droit à de magnifiques moments.
Juste avant la finale nous avons parlé avec Tristan Muyumba, ancien vainqueur avec vous. Pourquoi la Gambardella marque autant les esprits ?
Ce qu’il y a de fort dans cela, c’est aussi que les joueurs qui sont au centre de formation vivent ensemble 24h/24. Lorsque vous êtes pros’, vous vivez deux heures ensemble par jour et ensuite vous rentrez chez vous. Eux ils vivent ensemble ! Ça crée des valeurs, un groupe. Quand vous évoquez Tristan Muyumba, je me rappelle d’un match à Rodez où on passe aux penalties.
S’ils marquent le cinquième, c’est terminé ! Et puis le tireur frappe au-dessus et derrière on gagne. Il y a toujours des événements dans cette compétition qui peuvent pencher d’un côté ou de l’autre. Ensuite on joue Clermont à dix pendant 80 minutes après l’expulsion de Loïc Badiashile. Donc à ce moment-là, si vous n’avez pas de valeurs de groupe, de collectif, vous ne pouvez pas gagner ce match. Quand on démarre une compétition, on ne sait jamais là où ça nous mène.
L’histoire s’est répétée cette année ?
C’est évident. Cette année on démarre à Vénissieux, et souvent j’insiste sur l’importance des entames de matchs. Résultat on mène 2-0 au bout de cinq minutes là-bas, donc ensuite c’est parti ! Pareil à Rouen où on marque d’entrée (but de Saïmon Bouabré à la 5e minute, ndlr). Ensuite c’est un groupe qui se crée, je le répète. Un garçon comme Mayssam Benama, qui me dit après la finale : « Je te l’avais dit qu’on allait la gagner ! ». C’est bien de le dire, mais le faire c’est encore autre chose. Ça montre le caractère de cette équipe.
"𝖫𝖾 𝖽𝖾́𝖻𝗎𝗍 𝖽'𝗎𝗇 𝗅𝗈𝗇𝗀 𝖼𝗁𝖾𝗆𝗂𝗇, 𝗃'𝖾𝗌𝗉𝖾̀𝗋𝖾, 𝖺𝗏𝖾𝖼 𝗅'𝖠𝖲 𝖬𝗈𝗇𝖺𝖼𝗈"
Les premiers mots de Mayssam Benama après la signature de son premier contrat pro 🎥#Benama2026 | #MadeInLaDiagonale pic.twitter.com/UlIEhcECPh
— AS Monaco 🇲🇨 (@AS_Monaco) June 1, 2023
Ils ont vraiment été bluffants par moments, notamment à Nantes, un des favoris de la compétition, où on ne nous attendait pas. Dans cette compétition, face à une équipe inférieure, la normalité c’est de gagner, et si vous perdez c’est le petit qui a fait l’exploit. Et là-bas face à un gros, on fait une première mi-temps difficile, car il y avait une très belle équipe en face. Mais nous avons su faire le dos rond, et quand nous avons été mieux dans le jeu, que eux ont commencé à baisser de régime, c’est là qu’on a été décisifs et qu’on a marqué. Mais des temps faibles comme ça, nous en avons eu à tous les matchs. Il faut savoir les gérer.
C’est le caractère finalement qui a fait la différence ?
Du caractère et des personnalités qui se sont mises en avant. Il y a eu aussi Ritchy (Valme) qui a été le patron derrière. Il a montré l’exemple sur et en dehors du terrain. Mayssam lui c’était plus le leader technique. Et puis il y a des petits qui ont été performants, comme Saïmon Bouabré, Joan Tincres, Pape Cabral qui met le but décisif contre Nantes et qui marque à nouveau en finale.
C’est une belle génération !
Oui c’est une bonne génération, même s’il ne faut surtout pas s’enflammer. C’est ce que je leur dis tous les jours, de continuer à travailler et d’être encore présents l’année prochaine. Car il y en a beaucoup qui auront la possibilité de rejouer cette Coupe Gambardella.
Cette année c’était un peu différent car on a joué le premier tour en décembre, alors que c’est en janvier d’ordinaire, donc ce n’est pas évident. Et puis il faut avoir un peu de chance au tirage, même si cette année nous n’avons pas eu à aller aux penalties. Nous avons été solides tous les matchs et c’est logique de l’emporter à la fin.
Un dernier mot sur votre duo avec Manu Dos Santos, l’entraîneur des U17 ?
Avec Manu on s’entend les yeux fermés ! On a tellement l’habitude de travailler ensemble, on se connaît depuis très longtemps maintenant. On a la même vision de la formation et le même discours avec les joueurs au quotidien, donc c’est très facile !