Fermer
Rookie 08 juin 2023, 11:43

Ethan Schulz : "Je ne veux pas brûler les étapes"

Ethan Schulz : "Je ne veux pas brûler les étapes"
Reconnue comme l’un des meilleurs centres de formation de France, l’Academy de l’AS Monaco est à l’honneur dans la série "Rookie". Pour ce 7e épisode de la saison 2022-2023, pars à la rencontre d’Ethan Schulz, gardien des U17 et vainqueur de la Coupe Gambardella.

Il est une des belle surprises de la saison à l’Academy. Titulaire dans les buts des U17 de Manu Dos Santos pour sa deuxième année au sein de La Diagonale, Ethan Schulz, né à Grasse, a connu une belle éclosion tout au long de l’exercice.

Des U17 à la Gambardella en passant par les pros’

Jusqu’à connaître ses premières apparitions avec les U19, et participer activement à l’épopée des U18 en Coupe Gambardella, du quart de finale indécis à Nantes à la victoire finale au Stade de France face à Clermont (2-4). Alors au moment de tirer un bilan de cette saison riche en enseignements et en émotions, rencontre avec celui qui a fait ses premières armes dans les clubs de la région à Mandelieu, Mouans-Sartoux ou encore Mougins… jusqu’à faire partie du groupe pro’ face à Rennes en fin de saison. Entretien. 🎙

Bonjour Ethan. Pour commencer, parle-nous de ton parcours avant de rejoindre l’Academy à l’été 2021. 

Je suis tombé dans le foot dès mes six ans. Jusqu’à mes 11 ans, j’évoluais au poste d’attaquant, mais j’arrivais à une période où je songeais à arrêter et à me mettre à un autre sport, le hand. Sans trop vraiment l’expliquer, j’ai finalement continué le football. Et un jour lors d’un tournoi en U11, mon gardien se blesse et je le remplace.

Il y a ce grain de folie qui m'a attiré ! C'est un poste où on se jette par terre, on plonge tête la première dans les pieds des attaquants. Il faut débrancher quelque chose pour jouer dans cette position (rires).
Ethan SchulzSur le poste de gardien de but

J’ai bien joué sur cette compétition et depuis je n’ai plus changé de poste. Avec les années, j’ai réussi à faire mon trou avec mon club de Mougins et je finis par intégrer le Pôle espoirs d’Aix-en-Provence. Finalement, je suis repéré par l’AS Monaco.

Pourquoi avoir fait cette transition ? C’est un cas assez rare. 

Il y a ce grain de folie qui m’a attiré ! C’est un poste où on se jette par terre, on plonge tête la première dans les pieds des attaquants. Il faut débrancher quelque chose pour jouer dans cette position (rires). Puis j’aime cette notion de dernier rempart, car on a conscience d’être super important pour l’équipe, ça m’a vraiment plu. Pour gagner des titres, il faut absolument avoir un grand gardien, on l’a vu notamment avec Hugo Lloris à la Coupe du Monde 2018, ou Thibault Courtois avec le Real Madrid en Ligue des Champions l’an passé.

Et pourquoi avoir choisi l’AS Monaco ensuite ?

Très sincèrement, je me suis tout de suite senti comme chez moi ici ! C’est surtout une histoire de feeling. J’avais le sentiment que c’était à l’AS Monaco et pas ailleurs que je devais aller pour progresser au mieux. Le cadre et les infrastructures ont également eu un poids dans ma décision. Et puis Monaco est une ville calme. Au moment de me présenter le projet, j’ai notamment vu les vidéos de La Diagonale et du futur Centre de Performance et j’étais vraiment impressionné.

Comment s’est passée ton arrivée à La Diagonale

L’an passé, ma première année a été compliquée. J’avais besoin de m’adapter, donc j’ai manqué un peu de temps de jeu. Mais j’ai continué à travailler et cette saison j‘ai eu ma chance avec les U17, avec qui je pense avoir fait de bons matchs et surtout progressé. Avec les blessures de Lisandru (Olmeta) et Yanis Benchaouch, j’ai même eu l’occasion de faire partie de l’aventure en Coupe Gambardella avec cette première titularisation contre Nantes (0-1). 

Comment as-tu vécu cette transition soudaine ? 

Honnêtement, c’est venu à moi très rapidement. J’étais très heureux malgré tout d’intégrer des catégories supérieures même si je n’étais pas tout à fait prêt. Il faut que je fasse encore mes preuves, j’en ai conscience.

Je suis un gardien qui aime jouer au ballon, étant donné que suis à l'aise avec mes deux pieds. Je n'aime pas dégager loin devant, je préfère relancer court et si possible entre les lignes de manière propre. Je dois progresser dans ma détermination, dans mes gestes et être plus impactant sur les sorties aériennes.
Ethan SchulzSur ses points forts et ses axes de progression

Tu as même eu la chance de faire partie du groupe pro face à Rennes, pour la première fois. Comment l’as-tu vécu ? 

Oui c‘est tombé d’un coup. Je partais en week-end de quatre jours puis d’un coup je reçois un appel du coach me disant qu’un des gardiens est indisponible et qu’il compte sur moi pour être le troisième. Là encore c‘était une grande joie. Il faut se rendre compte de la chance que cela représente. À tout moment c‘est peut-être le seul groupe de Ligue 1 que je vais faire dans ma vie.

Quelle(s) différence(s) as-tu pu constater dans la préparation ? 

Les journées sont beaucoup plus longues déjà, surtout quand tu joues à 21h (sourire). Entre le moment où tu te lèves, le réveil musculaire, la préparation, le trajet vers le stade adverse, l’échauffement… c’est totalement différent ! À l’entraînement, l’approche tactique change également un peu.

On étudie beaucoup l’adversaire, comment faire pour l’empêcher de développer son jeu. Chez les jeunes, on est forcément davantage focus sur notre manière de jouer, nos principes. Cela fait partie de la formation. 

Pour te définir un peu, quel type de gardien es-tu selon toi ? Quelles sont tes qualités et tes axes de progression ?

Je pense être un gardien qui aime jouer au ballon, étant donné que suis à l’aise avec les deux pieds. Je n’aime pas dégager loin devant, je préfère relancer court et si possible entre les lignes de manière propre. Ensuite je sais que je dois progresser dans ma détermination, dans mes gestes aussi, être plus impactant sur les sorties aériennes par exemple. Je veux aussi être davantage maître dans ma zone.

Ethan a accumulé beaucoup de confiance en jouant régulièrement cette année avec les U17, contrairement à l'année passée. Il s'est toujours tenu prêt à aider l'équipe. Il a une technique déjà très aboutie, est très à l'aise des deux pieds sur le jeu court-jeu long, et bon sur sa ligne. Ses axes de progression sont la prise de risques dans le domaine aérien et le fait qu'il aille chercher plus loin dans la relance, car il lit très bien le jeu. Il faut qu'il se développe aussi athlétiquement et qu'il progresse dans la gestion de ses émotions.
Sébastien GimenezEntraîneur des gardiens du Groupe Elite

Quelles sont tes inspirations justement dans le foot ?

Le style de gardien que je préfère est celui dit en « croix » comme un André Ter Stegen, ou Manuel Neuer. Je me focalise sur eux. Ils sont très à l’aise au pied, beaux à voir jouer, ils participent à la construction des actions et sont même parfois des derniers défenseurs. Je cherche à leur ressembler.

Des grands gardiens sont passés à l’AS Monaco comme Fabien Barthez, Flavio Roma. Ce sont des exemples aussi pour toi ? 

Disons que ce sont des joueurs qui parlent moins à ma génération. Mais voilà un gardien comme Fabien Barthez, c’est quelqu’un qui a largement contribué au succès à la Coupe du Monde 1998 en France. Disons que c’est quelques crans au-dessus de la Coupe Gambardella (rires). Bien que le poste a évolué depuis cette époque, on peut s’inspirer de plusieurs aspects chez eux, que ce soit par leur parcours ou au niveau de la mentalité.

J'avais le sentiment que c'était à l'AS Monaco et pas ailleurs que je devais aller pour progresser au mieux. Le cadre et les infrastructures ont également eu un poids dans ma décision.
Ethan SchulzCe qui l'a convaincu de venir à l'AS Monaco

Avec le recul, quel bilan tires-tu de cette saison avec les U17 ?

Je suis globalement satisfait de ma saison. C’était la catégorie la plus adaptée pour moi et dans laquelle je me suis senti le mieux, le plus « légitime » on va dire. Au fur et à mesure de la saison, j’ai trouvé mes marques et j’ai rassuré l’équipe en étant décisif quand il le fallait. Je pense être monté en puissance.

Quel rôle ont joué tes entraîneurs, Corentin Plantier et Sébastien Gimenez ? 

Cela fait deux ans que je travaille avec Sébastien donc je connais bien sa méthodologie de travail. Corentin fonctionne de la même façon que lui donc on retrouve une continuité dans le boulot au quotidien, c’est vraiment très facile. On travaille régulièrement des situations que l’on retrouve en match. 

Ethan est parfois trop exigeant avec lui-même et on a travaillé ensemble pour qu'il dédramatise les matchs à enjeu. Dans des derbies contre Nice par exemple, il cherchait à trop en faire, était trop exigeant avec lui-même. Ce qui fait qu'il n'était pas toujours naturel. On a donc insisté sur ce point, et il a plutôt bien géré cet aspect contre Nantes en quart de finale de Coupe Gambardella, jusqu'à la finale.
Corentin PlantierEntraîneur des gardiens

Et le duo Frédéric Barilaro – Manu Dos Santos qui vous a accompagné en Gambardella ? 

Frédéric c’est quelqu’un qui aime se mettre en retrait et qui est très observateur. En étant gardien de but, je suis forcément moins en contact direct avec lui mais je suis très reconnaissant qu’il m’ait choisi pour disputer la finale et de manière plus générale, pour sa confiance accordée sur la saison. Et concernant Manu, il m’a donné confiance toute l’année, car j’ai joué une vingtaine de matchs avec les U17, que ce soit sur les rencontres importantes ou les plus « petits » rendez-vous. 

Parle-nous de cette épopée en Coupe Gambardella justement !

J’avais fait les premiers tours sur le banc, en observation. Avant le match face à Rouen, Lisandru Olmeta prend une mauvaise frappe sur le poignet. Moi ça ne change rien dans mon esprit, je pense être remplaçant car la mentalité d’un gardien, c’est que tant qu’on n’est pas mort, on joue les matchs (rires). Finalement il m’appelle et me dit qu’il sera absent, alors je suis propulsé des U17 à un quart de finale de Gambardella contre Nantes. Pareil pour la demi-finale, je ne m’attendais pas à être titulaire mais j’ai joué sans pression.

Avec Sébastien, on a insisté sur deux mots dans sa préparation de cet évènement pour qu'il se comporte comme quelqu'un de "sécurisant" et de "déterminant". À l'approche de la finale de la Coupe Gambardella, il fallait enfin ramener de la stabilité, un cadre qui le sécurise. C'est pourquoi on a souhaité rester focus sur des exercices qu'il connaissait pour le mettre en confiance. Tout en préparant le match avec notre analyste vidéo, Louis Megel, afin qu'il ait une bonne connaissance de l'adversaire.
Corentin PlantierA propos de la prépa' de la finale de Gambardella

Jusqu’à cette finale, au scénario complètement débridé !

Oui malgré l’ouverture du score adverse, on sentait qu’on avait la possession du ballon et des occasions avec des poteaux. On n’a pas craqué sous la pression, le coach nous a rassuré et nous nous sommes soutenus jusqu’à la fin. On réagit rapidement en menant à la mi-temps mais on ne s’est pas relâchés, on savait que seulement la moitié du travail était fait. J’avoue que le but de Pape Cabral en fin de match nous libère tous. 

La force de ce groupe, c’est l’état d’esprit ? 

La sérénité oui mais aussi la qualité. Sur l’ensemble de la compétition, on a eu une défense très solide, qui n’a encaissé que quatre buts en sept matchs. Et devant il y a du talent avec même des milieux de terrain capables de marquer comme Saïmon Bouabré, Pape Cabral. Lucas Michal et ses passes décisives, Joan Tincres à la finition. On s’est tous entraidés.

J'ai eu la même euphorie pour cette victoire que quand je gagne un tournoi en U13 (rires). Mais ce qui m'a fait prendre conscience de l'importance de l'événement, c'est l'arrivé au Stade de France. Quand on y pense, c'est un tournoi qui a été remporté par de très grands joueurs avant nous.
Ethan SchulzSur la portée de la victoire en Gambardella

Avez-vous l’impression avec tes partenaires d’avoir marqué l’histoire du Club ?

Sur le moment, je ne réalisais pas vraiment. J’ai eu la même euphorie pour cette victoire que quand je gagne un tournoi en U13 (rires). Mais ce qui m’a fait prendre conscience de l’importance de l’événement, c’est l’arrivé au Stade de France. Quand on y pense, c’est un tournoi qui a été remporté par de très grands joueurs avant nous. 

On est allés au Palais Princier, où l’on a reçu une médaille puis nous avons fait le tour d’honneur avec les supporters au Stade Louis-II à la mi-temps de Toulouse. Ça montre l’importance du trophée et c’est un beau moment de communion. Mais après ce succès, on a dû vite se remettre au travail car il y avait un match important avec les U17 à Ajaccio (3-3). On a été dans la lutte pour les play-offs toute la saison. Ne pas être parvenus à s’y qualifier, c’est forcément une déception même si l’exercice reste positif dans l’ensemble. 

Ça fait partie de tes objectifs pour la saison prochaine, une qualification pour les play-offs en championnat ? 

Oui l’idéal c’est que je réalise une bonne saison avec les U19 cette fois tout en poursuivant mon apprentissage. Défendre notre titre en Coupe Gambardella aussi, car je pense qu’on aura l’effectif pour. Il y avait des joueurs très jeunes cette année, notamment Pape qui peut encore là jouer deux fois. Et enfin, continuer de m’entraîner avec le Groupe Elite et pourquoi pas le groupe professionnel. Si une occasion de jouer se présente à moi, je me tiens prêt. Même si je ne veux pas brûler les étapes.

Pour finir, récemment tu es entré en cours de jeu face à Lyon avec le Groupe Elite. Comment l’as-tu vécu ? 

Oui j‘étais sur le banc de touche et je ne m’attendais pas du tout à entrer en jeu. A l’heure de jeu, on m’appelle et me dit que je dois rentrer alors que quand je regarde Yanis Benchaouch, il est debout, il va bien donc je ne comprend pas trop pourquoi je devrais rentrer. Mais je me tiens prêt, je m’échauffe et je fais le match. En en reparlant avec lui, il m’a expliqué que c’est un test qui a l’habitude de faire pourvoir notre réaction. C’était donc une bonne expérience. 

Il n'était pas du tout prévu qu'il joue, il ne le savait pas. L'idée était de le mettre dans la peau d'un numéro 2. Dans ce cas de figure, le gardien a deux minutes pour se préparer, car il rentre soit sur un carton rouge ou sur blessure. Donc on l'a mis en situation de stress pour voir sa réaction. On a joué le jeu jusqu'au bout, et il s'en est très bien sorti.
Sébastien GimenezSon entrée avec le Groupe Elite