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Les grands entretiens 10 juin 2023, 15:07

Deschamps, l’épopée de 2004, son duo avec Bernardi… Entretien avec Andreas Zikos

Deschamps, l’épopée de 2004, son duo avec Bernardi… Entretien avec Andreas Zikos
Présent au Stade Louis-II en marge de la 38e journée de Ligue 1 contre Toulouse, pour un hommage aux vainqueurs du doublé de 1963 et de la Coupe de la Ligue 2003, l’ancien milieu grec de l’AS Monaco a pris le temps d'évoquer ses souvenirs.

Il ne fait pas partie des éléments les plus extravertis de la génération 2004. Pourtant, Andreas Zikos – qui vient de fêter son 49e anniversaire – a eu un impact considérable dans la construction de l’équipe qui s’est offert une épopée incroyable en Ligue des Champions.

Un hommage à 2003 face à Toulouse

Lieutenant infaillible de Didier Deschamps, resté dans le coeur de tous les supporters des Rouge et Blanc, l’ancien milieu de terrain grec s’est raconté en marge d’une rencontre de Ligue 1 face à Toulouse. Juste avant l’hommage rendu aux vainqueurs du doublé de 1963 et de la Coupe de la Ligue, il avait ainsi pris le temps d’évoquer ses souvenirs. Avec la classe qui le caractérise. Rencontre. 🎙

Bonjour Andreas. Tout d’abord, qu’est-ce que cela vous fait de revenir ici au Stade Louis-II ?

(Il précise dans un français parfait) D’abord je veux m’excuser pour mon français, car cela fait longtemps que je ne parle plus la langue. J’ai de grands souvenirs dans ce stade, et je suis très heureux de revoir cette pelouse, car j’ai vécu des émotions intenses pour ce club de l’AS Monaco et avec cette équipe. Donc je suis très heureux d’être ici aujourd’hui.

Je garde en tête ce moment lorsqu’on gagne la finale de cette compétition, où Ludovic Giuly vient me chercher pour que je soulève la coupe avec lui. Ça c’était quelque chose d’incroyable : Merci Ludo !
Andreas ZikosA propos de la finale de la Coupe de la Ligue

Vous êtes ici notamment pour célébrer les 20 ans de la victoire en Coupe de la Ligue. Racontez-nous ce souvenir…

Pour moi c’était une année bizarre, car j’ai été avec l’équipe pendant six mois, puis j’ai eu une grave blessure qui m’a tenu éloigné des terrains. Mais je garde en tête ce moment lorsqu’on gagne la finale de cette compétition, où Ludovic Giuly vient me chercher pour que je soulève la coupe avec lui. Ça c’était quelque chose d’incroyable : Merci Ludo !

Ludovic qui met d’ailleurs un doublé contre Sochaux au Stade de France !

Oui c’était une finale magnifique. Ce n’était pas aussi facile que le score ne le laisse penser (succès 4-1), mais je pense que nous avons fait un très bon match, avec de très bons joueurs. Nous avions une ambiance incroyable dans le vestiaire, qui a été très importante pour montrer des choses sur le terrain ce jour-là.

Justement, un homme est à la création de cette « famille » : Didier Deschamps. Avec le recul, quel impact a-t-il eu sur cette génération ?

Je pense que le plus important dans une équipe de foot, c’est d’avoir quelqu’un qui peut tirer le meilleur de ses joueurs et qui fait qu’ils sont les meilleurs. Et pour ça, il faut des joueurs avec de la personnalité, en plus de grandes qualités footballistiques.

Ce qui m’a marqué la première fois où je l’ai rencontré, alors que je ne parlais pas encore le Français, c’est quand il m’a dit : "Il faut juste que tu apprennes deux mots, ça vient et seul !" (rires).
Andreas ZikosSa rencontre avec Didier Deschamps

Si tu n’as pas ces deux ingrédients dans un groupe, c’est difficile de créer quelque chose de bien, qui rejaillit sur le terrain. Didier connaît très bien le football, et il a choisi les bons caractères pour réussir.

Quelle était votre relation avec lui ?

Pour moi c’était très facile ! D’abord parce que nous avons joué au même poste. D’ailleurs nous n’avons presque jamais parlé de la façon dont je devais jouer. Mais ce qui m’a marqué la première fois où je l’ai rencontré, alors que je ne parlais pas encore le Français, c’est quand il m’a dit : « Il faut juste que tu apprennes deux mots, ça vient et seul ! » (rires). Donc c’est ce que j’ai fait et tout s’est bien passé.

Vous avez connu de grands joueurs aussi à l’AS Monaco. Lesquels vous ont le plus impressionné ?

Je n’ai connu que des joueurs magnifiques ici ! Et je pense vraiment que le secret de cette équipe, c’était le groupe. On avait une équipe avec de bons caractères et de bons footballeurs. En plus on avait derrière un entraîneur et un coach adjoint (Jean Petit), qui donnaient tout pour garder cette ambiance ensemble.

C’était une armoire, une montagne. Il était planté au milieu de terrain, il ratissait tout. C’était une machine de guerre, il était carré. Quand tu passes des joueurs de l’équipe de jeunes ou de réserve et que tu te retrouves en groupe pro à te frotter à des joueurs comme Andreas Zikos, forcément ça fait une différence dans l’impact physique !
Olivier VeigneauA propos d'Andreas Zikos

Parlez-nous de ce duo exceptionnel que vous formiez avec Lucas Bernardi !

Nous avons trouvé chacun notre rôle. C’est ce qui est le plus important, et derrière on acceptait ça. C’était donc très facile de faire des bonnes choses sur le terrain. Lucas il était libre de faire du jeu un peu plus haut et moi j’étais vraiment là pour couvrir derrière, rattraper les erreurs et soulager la défense.

Jérôme Rothen nous disait récemment : « Akis c’était un patron, on ne l’entendait pas beaucoup, mais quand il parlait on l’écoutait ! »

C’est la deuxième chose que Didier m’a demandé lors de ma seconde saison ici en 2003-2004, après ma blessure lors du premier exercice. Il m’a dit : « Tu peux donner des conseils et des consignes aux gars sur le terrain ». C’était une surprise pour moi, mais j’essayais de le faire. Car quand tu as devant toi des joueurs comme Ludovic Giuly, Fernando Morientes, Jérôme Rothen ou Patric Evra, ce n’était pas évident. Mais j’ai tenté de le faire au mieux.

Que dire de cette saison exceptionnelle justement, où les planètes se sont alignées et où Fernando Morientes a amené toute son expérience à ce groupe ?

Il ne nous a pas seulement apporté son expérience, mais aussi son humilité, sa personnalité ! C’est la personne la plus simple que j’ai eu la chance de rencontrer dans le football. Moi je venais de Grèce et lui venait d’Espagne, du Real Madrid, ce qui nous rapprochait au niveau du tempérament.

Il y avait une ambiance dans l’équipe et dans le Club, une forme de caractère et une alchimie qui faisaient notre force. C’est la première fois que je vivais ça ! Quand tu penses au fait qu’Evra, Squillaci, Givet, Ibarra, Morientes et moi c’était pratiquement la première année qu’on jouait ensemble.
Andreas ZikosSur l'alchimie dans le groupe de 2004

En tout cas, tout le monde essayait de suivre son caractère et son comportement. Il a tout connu. Encore une fois il avait les qualités sur le terrain comme humainement. C’était un exemple pour tous !

Il nous avait confié qu’il avait vécu une saison très spéciale ici, malgré la grande carrière qu’il a connue avant…

Je pense que ça s’explique par tout ce que je viens de dire. Il y avait une ambiance dans l’équipe et dans le Club, une forme de caractère et une alchimie qui faisaient notre force. C’est la première fois que je vivais ça ! Quand tu penses au fait qu’Evra, Squillaci, Givet, Ibarra, Morientes et moi c’était pratiquement la première année qu’on jouait ensemble. Et pourtant les résultats sur le terrain étaient incroyables.

Justement cette épopée en Ligue des Champions. Que retenez-vous de tout ça, notamment de cet exploit contre le Real Madrid ?

Ce match retour contre le Real c’était un peu dur pour moi, car j’étais en tribune à cause d’un claquage. Donc c’était très difficile pour moi de regarder le match. Mais à la fin ça reste un moment magnifique, on ne croyait pas vraiment ce qu’il était en train de se passer. C’était quelque chose d’exceptionnel !

Je pense que c’est l’histoire dans sa globalité que les gens retiennent, toute cette épopée. Ça débute par la phase de groupes, avec Eindhoven, La Corogne avec cette victoire exceptionnelle 8-3 !
Andreas ZikosSur la trace qu'a laissé cette épopée 2004

Ensuite il y a ce carton rouge en demi-finale aller contre Chelsea qui vous prive du retour…

Encore aujourd’hui je pense que ce n’était pas juste ! J’ai pris d’autres cartons rouges dans ma carrière, mais celui-là n’était pas justifié. Et ça s’est vérifié par la suite, puisque l’UEFA ne m’a mis qu’un match de suspension derrière. Ils ont certainement vu la vidéo et compris que je n’avais rien fait. Ça a été très dur à vivre pour moi, jusqu’au moment où j’ai appris que je pourrais jouer la finale.

En général on dit que seuls les titres comptent. Comment expliquez-vous que ce parcours en C1 ait touché autant de monde ?

Je pense que c’est l’histoire dans sa globalité que les gens retiennent, toute cette épopée. Ça débute par la phase de groupes, avec Eindhoven, La Corogne avec cette victoire exceptionnelle 8-3 ! Je pense que c’est tout ce chemin incroyable que les supporters n’ont jamais oublié. Ce n’est pas spécialement la finale.

Je pense que paradoxalement, même si les gens pensent que ce n’était pas le plus dur dans notre parcours, c’est quand on passe les huitièmes de finale contre le Spartak Moscou. Ici on rate un penalty, et on a besoin d’un but pour se qualifier. Je crois que c’est Dado Prso qui marque, et ce match-là m’a donné une grande émotion.
Andreas ZikosSon meilleur souvenir

Une saison 2003-2004 très riche, avec également le podium en Ligue 1 !

Nous terminons effectivement à la 3e place du championnat, en allant au passage en demi-finale de la Coupe de la Ligue et de la Coupe de France. Fin février je pense que nous étions à 6 ou 7 points devant l’Olympique Lyonnais, mais à la fin malheureusement nous n’avons rien gagné. Je pense que nous avons payé le fait d’être 14-15 joueurs pour mener de front toutes les compétitions.

Si vous n’aviez qu’un seul souvenir à retenir de votre passage en Principauté, un moment fort ?

Meilleur ou pire (il sourit) ? Le pire c’était justement ce carton rouge sur Claude Makélélé face à Chelsea, sans aucun doute. Et le meilleur, je pense que paradoxalement, même si les gens pensent que ce n’était pas le plus dur dans notre parcours, c’est quand on passe les huitièmes de finale contre le Lokomotiv Moscou.

C’était le meilleur passage de ma carrière footballistique, sans aucun doute ! Car le niveau était vraiment très haut, et même si nous n’avons pas gagné beaucoup de trophées à l’arrivée, malgré tout je suis très heureux car j’ai rencontré beaucoup de très bons joueurs et de très bonnes personnes.
Andres ZikosLe résumé de ses années à Monaco

Ici on rate un penalty, et on a besoin d’un but pour se qualifier. Je crois que c’est Dado Pršo qui marque, et ce match-là m’a donné une grande émotion. Et ensuite la finale de la Coupe de la Ligue où Ludo me fait venir pour la soulever avec lui !

Êtes-vous encore en contact avec les joueurs de cette génération ?

Nous avons un groupe WhatsApp sur lequel nous gardons le lien effectivement et sur lequel on fête les anniversaires de chacun. Et il y a Pierre-Jo aussi qui nous aide beaucoup pour ça !

Si vous deviez résumer votre expérience à l’AS Monaco, que diriez-vous ?

C’était le meilleur passage de ma carrière footballistique, sans aucun doute ! Car le niveau était vraiment très haut, et même si nous n’avons pas gagné beaucoup de trophées à l’arrivée, malgré tout je suis très heureux car j’ai rencontré beaucoup de très bons joueurs et de très bonnes personnes.

Vous avez également défendu les couleurs de la Grèce. On imagine que c’était un honneur…

C’est la question qu’on me pose encore aujourd’hui (sourire) : comment est-ce possible que je n’ai pas participé à l’Euro 2004 que la Grèce a remporté ? L’entraîneur Otto Rehhagel était un peu spécial, tous les journalistes se demandaient pourquoi je n’étais pas en sélection. Mais au final il ne m’a jamais appelé. C’est une histoire qui m’a touchée, mais aujourd’hui c’est oublié.

Un dernier mot pour les supporters monégasques qui vous ont gardé dans leurs cœurs ?

Il faut continuer à soutenir le Club, qui a une grande histoire. Un grand MERCI pour hier et pour leur accueil aujourd’hui. 🇲🇨