Alexandre Ruiz : "Fernando Morientes a laissé une trace indélébile"
Lui aussi est un enfant de Canal +. Lui aussi a connu la grande époque de la chaîne cryptée, avec Thierry Gilardi à la tête de L’Équipe du dimanche. Au début des années 2000, le jeune journaliste qu’il est, suit de près la Liga. Lui, le franco-espagnol, né à Casablanca. Victime d’un grave accident avec un ancien monégasque, Luc Sonor, alors qu’ils sont sur la route pour commenter un match, il touche du doigt la mort en 2005. Avant de se sortir miraculeusement de cet épisode. Depuis, comme investi d’une mission, il faire vivre le quotidien du football à ses nombreux abonnés, notamment sur Twitter, par le biais de ses fameuses revues de presse.
Il est le présentateur phare de beIN Sports depuis 2012
Au passage, il ne manque jamais de partager des ondes positives, des pensées optimistes. Comme lorsqu’il décide de partager un bout de son jogging matinal quotidien. Désormais tête d’affiche de beIN Sports à la présentation depuis la création de la chaîne en 2012, il s’épanouit dans un rôle de chef d’orchestre qui lui va à merveille. Dans les soirées européennes, comme à l’animation de l’émission Football Show le lundi soir à 21h, il fait briller une myriade de consultants de luxe. Lui, c’est Alexandre Ruiz, grand passionné du ballon rond et du football espagnol en particulier. Rencontre avec un maestro de l’antenne.
Bonjour Alexandre. Avez-vous vécu des moments particuliers avec l’AS Monaco ?
Je retiens un moment en particulier, qui m’a marqué de façon très forte. Il s’agit de l’épopée européenne de 2014-2015 avec cette confrontation aller-retour face à Arsenal. Le 17 Mars 2015, je me déplace avec mes compères de beIN Sports pour couvrir le match retour au Stade Louis-II avec une ambiance qu’on avait plaisir à retrouver. Il y avait un vrai parfum européen dans cette soirée. Non pas par ses buts (Monaco perd 2-0 mais se qualifie pour les ¼ de finale de Ligue des Champions, ndlr), mais la physionomie de cette soirée en général avec cette défense héroïque face aux Anglais. Au final, il y a eu 2-0 pour Arsenal, avec cette peur de concéder un but jusqu’aux derniers instants. C’était absolument incroyable.
D’autant que vous avez vécu ce moment avec un ancien monégasque, Ludovic Giuly…
Oui. Je me souviens que nous étions au bord de la pelouse avec Ludo Giuly notamment. Au coup de sifflet final du match aller à l’Emirates Stadium, dans un élan de générosité, il va chercher S.A.S. le Prince Albert II, avec son micro ouvert. ll arrive auprès de son altesse et le salue. Il respecte alors parfaitement le protocole, mais il voulait partager un moment particulier avec les téléspectateurs. Ce dernier n’hésite d’ailleurs qu’un quart de seconde avant de nous rejoindre à l’antenne, et nous livrer ce moment si particulier avec le président Dmitry Rybolovlev. En plus, avant d’arriver à notre niveau, ils étaient à 100-150 mètres et durant tout le trajet on suivait Ludovic Giuly qui nous faisait vivre la chose, encore une fois micro ouvert.
C’est votre meilleur souvenir ?
Ces deux soirées illustrent parfaitement tout ce qu’est le football selon moi. À la fois, une passion populaire avec les spectateurs présents. La mémoire de l’épopée exceptionnelle de 2003-2004 et de ceux qui ont porté haut et fort les couleurs de l’AS Monaco, comme Ludovic Giuly. Il y avait un autre ancien également, avec Sonny Anderson. Et puis ceux qui ont porté le maillot de l’équipe de France, Marcel Desailly et Robert Pirès. C’était un moment de vrai et pur direct. J’étais un homme de télévision, mais aussi un gosse en plein rêve. Un passionné à un match de foot aux côtés de grands noms, mais aussi un homme au milieu d’un direct. C’était un moment unique. Il y avait même Bono le chanteur de U2 qui était invité d’ailleurs au Stade Louis-II. Cela reste un moment à part pour moi.
Y a-t-il une autre anecdote sur ce match, qui vous revient en mémoire ?
Quand le coup de sifflet retentit, Arsenal est éliminé. A ce moment-là, Santi Cazorla, malgré la défaite, parcourt les 200 mètres pour m’apporter son maillot, étant donné que je suis franco-espagnol et que je suis beaucoup la Liga. J’avais pu lier une relation avec lui, et c’était un geste très humain venant de lui, alors qu’il venait de se faire éliminer de la Ligue des Champions, à l’extérieur. Surtout qu’il ne devait avoir qu’une envie : retourner aux vestiaires. Et pourtant, il a quand même eu cette pensée pour moi. Encore une fois, le Stade Louis-II a vraiment tout réuni dans cette soirée-là.
Vous parliez de Marcel Desailly. Vous souvenez-vous de cette scène un peu cocasse où il réalise une vidéo en direct en plein but de l’AS Monaco ?
On est une génération de gens connectés, et nous utilisons les réseaux sociaux pour être au cœur de l’actualité, pour faire vivre l’instant présent à nos abonnés. Je suis le premier concerné à ce sujet. J’ai d’ailleurs souvent échangé avec Marcel à propos de l’utilisation de ces réseaux, sur la manière de les utiliser à bon escient. Ce moment pour lui au Stade Louis-II est l’un des éléments clés, selon moi, de ce qu’il a voulu transmettre. Il avait l’habitude de faire ça dans différents stades pour rendre compte de ses pensées et des moments de foot à ses abonnés. Alors voir un stade se renverser avec un scénario incroyable, alors qu’il était en train de se plaindre du spectacle proposé. En plus avec son rire, c’était un moment extraordinaire.
📽 Miracle en direct 😅👍🏾
Bravo l'@AS_Monaco #DagheMunegu pic.twitter.com/X088CLjStn— Marcel Desailly (@marceldesailly) September 27, 2016
Quels joueurs de l’AS Monaco vous ont-ils marqué ?
Fernando Morientes évidemment. Encore une fois, on retrouve le lien privilégié que j’entretiens avec l’Espagne. Je l’ai connu comme joueur. Quand il arrive à Monaco, je réalise sa première interview en France. À l’époque, je travaillais pour Canal+. On fait ça sur le port avec l’un de ses garçons qui était très jeune. Tout se passe bien et plusieurs semaines plus tard, il me fait parvenir un maillot dédicacé avec ce fameux numéro 10. Il n’est pas resté très longtemps en Principauté, mais il a laissé une trace indélébile à Monaco. Il avait une relation très forte avec Didier Deschamps, et a grandement participé à cette épopée européenne de 2004. J’ai échangé avec lui il y a quelques semaines pour une émission sur beIN Sports où il m’a conté son aventure monégasque.
Il me racontait ça avec des mots très forts. Pour lui, Didier était comme son deuxième papa. Au terme de la rencontre contre le Real Madrid, son club, il est accroupi au sol en train de pleurer et Didier pose sa main sur son épaule. Il le remercie alors de l’avoir relancé dans sa carrière. Il est devenu cette saison-là meilleur buteur de la Ligue des Champions, chose qui n’était jamais arrivée avec le Real. Et pourtant, personne n’aurait posé une pièce sur cette équipe, mais l’AS Monaco a réalisé de grandes choses durant cette campagne. Au final, c’est Didier Deschamps qui lui a répondu : « Non, merci à toi, Nando ». Il y a des moments comme ça qui ne s’oublient pas, et ce joueur l’incarne parfaitement, selon moi.
C’est un peu le symbole de ces équipes de l’AS Monaco qui mettaient en valeur de grands joueurs…
C’est vrai que c’est exactement ça. L’AS Monaco a toujours su trouver ce mix entre jeunes joueurs et joueurs expérimentés de renom. Cela a toujours été le cas. Il y a eu des épopées avec Glenn Hoddle & Co, mais aussi avec Sonny Anderson, George Weah et donc Fernando Morientes. Quand il était là, l’équipe était imprenable. Tous ces joueurs ont laissé de beaux souvenirs, créant de supers groupes. La cité de Monaco a ce parfum-là, et l’équipe le retranscrit parfaitement sur le terrain. Ce n’est pas étonnant.
Le sport le jeu et le talent ont repris leur place⚽️️ @BVB Vs @AS_Monaco @KMbappe @benmendy23 @sonnyanderson10 @alexandreruiz @Bernardosil pic.twitter.com/qS0nNpedeZ
— Marcel Desailly (@marceldesailly) April 12, 2017
Pourquoi est-ce toujours spécial de venir au Stade Louis-II ?
Parce que c’est un État. On a l’impression de venir dans une capitale. Il y a un Prince aussi à la tête de Monaco, une histoire de famille avec un grand respect des armoiries, cela rend donc le tout assez spécial. Quand Ludovic Giuly va voir le Prince pour l’avoir au micro, il y a un respect de la fonction qui est unique. Et encore une fois ça reste un stade qui est l’œuvre d’une famille avec une volonté de voir une activité omnisports, il y a quelque chose de différent dans cette enceinte.
Ludovic Giuly vous a-t-il parlé de son lien avec ce club ?
Oui ce lien est très particulier et je pense d’ailleurs au fond de moi que son histoire avec ce club n’est pas tout à fait finie. Il reviendra sûrement. Ses enfants portent le maillot Rouge et Blanc. Quand on est marqué de la sorte par une épopée européenne, celle qu’il a vécu, cela reste forcément une période unique dans la mémoire d’un joueur, d’un homme. Malgré tout ce qu’il a pu connaître ensuite au Barça.